vendredi 7 janvier 2011

Haïti: des dons envoyés, mais toujours pas reçus

Publié le 07 janvier 2011 à 05h00 | Mis à jour à 09h42



Dans le port de Port-au-Prince, des dizaines de conteneurs s'alignent, attendant d'être déchargés. Cela peut prendre des mois.
LA PRESSE, IVANOH DEMERS
Le Soleil
(Québec) Un an après le séisme en Haïti, les tentes et le matériel médical envoyés par la Ville de Québec n'ont pas encore atteint les sinistrés, a appris Le Soleil. Le matériel est pourtant arrivé il y a plus de deux mois sur l'île dévastée, mais dort depuis dans un conteneur sur les quais de Port-au-Prince. Histoire d'un long voyage.
En avril dernier, la présidente de l'arrondissement Charlesbourg, Odette Simoneau, lance un projet pour venir en aide aux sinistrés du tremblement de terre du 12 janvier 2010. Plutôt que se contenter de classiques dons en argent, l'élue décide d'«adopter» un quartier de Port-au-Prince, Delmas, pour aider à sa reconstruction.
Comme premier geste d'urgence, Mme Simoneau organise en mai une collecte de tentes pour offrir un abri de fortune aux centaines des milliers d'Haïtiens laissés sans toit par le séisme. Même si 225 tentes ont été rassemblées en juin, il a néanmoins fallu attendre octobre avant de les voir prendre le chemin de la mer vers Haïti. Charlesbourg a en effet d'abord dû mener une collecte de fonds pour trouver les 8000 $ nécessaires à l'envoi du matériel.
Les tentes ont finalement été chargées dans un conteneur pour partir de Québec le 10 octobre à bord d'un navire affrété par Collaboration Santé Internationale (CSI), une organisation non gouvernementale de Québec spécialisée dans le transport de matériel médical.
La cargaison a atteint Port-au-Prince trois semaines plus tard, un transit jugé «normal» par la voie des mers. Mais depuis, impossible d'avoir accès au matériel.
«Oui, ça prend du temps: il y a l'expédition, puis les tracasseries administratives», se désole Hervé Denis, président du Club Rotary de Delmas, responsable de récupérer puis de distribuer le matériel récolté par Québec. L'homme joint à l'hôtel qu'il possède à Port-au-Prince dit éprouver de la difficulté à dédouaner le conteneur.
Au lendemain du séisme, le gouvernement haïtien avait suspendu ses règles aux douanes pour faciliter l'arrivée de dons de matériel humanitaire. Mais depuis, ces mesures ont été resserrées. Si bien que le Club Rotary de Delmas doit maintenant produire la liste détaillée de tous les biens du conteneur, le «connaissement», dans le jargon maritime.
«C'est compliqué et ça fait perdre du temps», déplore M. Denis qui tente depuis deux mois d'avoir accès au matériel.
Chez CSI, on ne s'étonne pas de savoir que le conteneur attend toujours d'être dédouané. «Ça arrive souvent. Ça peut prendre plusieurs mois», a indiqué la responsable du transfert des tentes de l'ONG jointe par Le Soleil.
Lourds dommages au port
Outre les problèmes de dédouanement, le retard peut également s'expliquer par les lourds dommages subis au port de Port-au-Prince lors du séisme. Celui-ci a beau avoir été réparé en priorité pour faciliter l'acheminement de matériel en Haïti, sa capacité d'accueil demeure encore limitée.
La difficulté d'un simple envoi de tentes illustre tous les problèmes minant la reconstruction d'Haïti, constate Hervé Denis.
«Il y a très peu de construction, au grand désespoir de tous parce qu'on aimerait bien sortir les gens des tentes. On n'est pas encore au rythme qu'on aimerait être», dit celui qui se décrit néanmoins comme très optimiste. «Je dis souvent que les opportunités sont grandes dans ce pays. C'est quand tout est détruit qu'on peut tout construire.»
N'empêche, le projet de reconstruction d'une école de métiers que souhaite financer l'arrondissement Charlesbourg risque d'être considérablement retardé.
«La mairie de Port-au-Prince a trouvé un terrain, mais les circonstances ont fait que les choses sont retardées. Nous n'avons pas seulement eu comme malheur le tremblement de terre, se désole Hervé Denis. Il y a eu depuis les ouragans, les problèmes électoraux et ultimement le choléra.»

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