samedi 5 février 2011


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Last Updated: Feb 5th, 2011 - 16:07:14


Scléroses ! / de Daly Valet 
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Feb 5, 2011, 16:06


                         Scléroses !
Le Matin, 4 au 10 fév. 2011
Par Daly Valet

Le chanteur populaire Michel Martelly ira au second tour de la présidentielle. La rue l’a ainsi voulu. L’international a manœuvré pour  tout imposer au nom du respect de la volonté populaire. Le candidat du pouvoir, Jude Célestin, s’est vu ainsi sacrifier par le machiavélisme, les retournements de casaque subits des uns et des autres. Le jeu était fait.  La fatigue générale  vis-à-vis d’un pouvoir inefficace qui, à la lumière des révélations sur d’éventuelles magouilles électorales, n’entendait pas s’imposer des limites éthiques dans ses visées de reconduction à la tête de l’État, et le raidissement des positions américaines contre le président Préval et ses affidés les plus retors,  auront contribué à cette déconvenue du camp Inite.

La récente visite en Haïti de la Secrétaire d’État  américaine, Hilary Clinton, a eu pour effet de donner plus de crédibilité et de poids aux menaces et aux sanctions ciblées de Washington. Cet investissement personnel de Mme Clinton dans le déblocage du processus électoral a été fort utile. A défaut de tout résoudre,  elle aura au moins permis de dégager les horizons et d’ouvrir des perspectives de normalisation politique et institutionnelle. A charge pour les Haïtiens eux-mêmes de se faire grands, de se dépasser  et de s’élever à la hauteur des grands défis qui les interpellent. Il y a surtout lieu de consolider cette accalmie des rues qui a suivi la publication des résultats définitifs du premier tour des élections présidentielle et législatives.  

  L’application stricte et sans détours politiciens des recommandations de la mission d’experts de l’OEA était devenue l’aune à partir de la laquelle l’honnêteté et le sérieux de Port-au-Prince à tenir des élections vraiment démocratiques allaient être évalués. Du palais national au CEP, les rugissements révoltés,  désespérés et faussement nationalistes de vieux lions blessés et affaiblis, n’auront rien fait pour renverser la nouvelle dynamique politique enclenchée depuis les violentes contestations populaires du mercredi 8 décembre 2010. Les élites politiques et économiques d’Haïti, encore prisonnières des pratiques autoritaires et arrière-gardistes du passé, devront enfin se rendre à l’évidence que la vérité des urnes est la seule viable possible dans le monde actuel des opinions publiques progressistes et réfractaires aux dominations élitaires trafiquées. Depuis les élections générales de 1990, celles de 2006, la leçon leur est mille fois enseignée: il faut compter avec le peuple et la communauté internationale dans la poursuite du pouvoir. Avec le peuple, respecter ses choix et se conformer à ses aspirations profondes. Avec l’international, veiller à ce que les principes universels de droits humains soient respectés.  Mais mille fois ces élites se comportent comme si elles n’avaient rien assimilé des enseignements de l’histoire haïtienne contemporaine ni des récentes évolutions mondiales en ce qui se rapporte à l’affirmation et la défense des droits des peuples.

Cette propension de l’international, notamment en Haïti depuis 2006,  à se mettre du coté des masses révoltées et à imposer leurs propres vues biaisées des choses,  n’est pas sans empoisonner la vie politique  du pays ni sans brouiller les mécanismes institutionnels et démocratiques   de règlements  des crises. Il y a là un paternalisme à répudier, et une dynamique de patronage du processus politique et de court-circuitage des institutions locales à combattre. Car il peut y avoir errements du côté d’une frange populaire de l’électorat, laquelle, à l’instar de ses amours idolâtrées, est peu imbue des préceptes démocratiques. Tout ce qu’exige la rue n’est pas forcément conforme à la démocratie. On ne saurait édifier une république stable, moderne et apaisée  sur les humeurs passagères des foules. Les diktats externes ne stabiliseront rien non plus dans la durée. Dans ses dynamiques actuelles et dans sa traduction concrète dans les affaires politiques haïtiennes, cette jonction « peuple » et « communauté internationale » est de très mauvais augure. Il faut une rectification.

La rectification est nécessaire si l’on veut qu’aboutisse enfin la transition démocratique ouverte avec l’effondrement du régime des Duvalier le 7 février 1986. Vingt-cinq ans déjà ! Vingt-cinq ans de tâtonnements. De paralysie. De soif du pouvoir rien que pour le pouvoir. Vingt-cinq ans de gestion catastrophique et chaotique de la  transition par des élites militaires et civiles à la fois débonnaires et fainéantes.  Vingt-cinq ans qui nous voient de fait sous tutelle étrangère. Au plan social, il n’y a pas seulement eu stagnation, mais aussi et surtout des reculs. Il y a eu certes des avancées sur le volet des libertés publiques, mais il y a très peu à montrer en termes de bilan positif aux générations montantes.  Le peuple fait désormais partie du jeu politique, mais très mal compris et encadré dans ses besoins essentiels par les élites dirigeantes. Avec des intellectuels haïtiens de renom, nous ouvrons le débat sur ces vingt-cinq ans dans les pages qui suivent (voir pages 15-23). Histoire de souligner la sclérose dans laquelle nous pataugeons. Et de dire non à l’ordre actuel des choses.    

D.V.

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